Pourquoi 256 fusillés à Souge ?
On a coutume de rappeler qu’après le Mont Valérien, le camp de Souge est le deuxième lieu de fusillades en France.
Trois éléments essentiels peuvent expliquer cette réalité.
Ces fusillades se sont déroulées sur quatre années : deux fusillés en 1940, cinquante et un en 1941, quatre-vingt-dix-neuf en 1942, deux en 1943 et cent deux en 1944.
Le curé de Martignas, sollicité pour accompagner les victimes, a avancé à la Libération le chiffre de trois cents fusillés. Si le recensement effectué à partir des listes d’archives officielles fait apparaître 259 noms, l’Association honore, y compris sur ce site, 256 noms, identifiés comme patriotes résistants, un s’est avéré être un collaborateur, et deux ont été fusillés pour des motifs n’ayant aucun lien avec la résistance à l’occupant.
Pour les nazis, Bordeaux était une base stratégique de première importance. C’était « LA » base de l’Atlantique Sud, tournée vers les États-Unis d’Amérique, mais aussi vers les colonies d’Afrique, le grand commerce international, le Japon et l’Indonésie. La ligne de démarcation a d’ailleurs coupé la Gironde en deux sur une bande allant jusqu’à la frontière espagnole. Ainsi Bordeaux, à proximité de l’Espagne, chemin de Londres et de l’Afrique, était un port, un aéroport, avait des usines d’aviation.
La conséquence en fut la construction du mur de l’Atlantique, de la base sous-marine, la présence de forces armées importantes, et les mouvements de torpilleurs, de ravitailleurs, de sous-marins, qu’ils soient allemands, japonais ou italiens.
Le choix des hommes chargés de la répression doit aussi à cet enjeu géographique. Préfets et policiers choisis par Vichy, chefs militaires et «gestapistes» choisis par Hitler, étaient particulièrement engagés dans la mise en œuvre de l’idéologie d’exclusion, contre les communistes, les Juifs, les francs-maçons, les Tziganes, les homosexuels, les résistants et patriotes de toute obédience et une classe ouvrière combative. Leur acharnement est reconnu comme ayant fait de la région une des zones les plus dangereuses pour la Résistance, d’autant qu’ils ont trouvés des auxiliaires précieux dans quelques résistants «retournés». Enfin, la politique des otages a été particulièrement meurtrière en 1941 et 1942.